juin 04, 2007

AVEUX ACCABLANTS ET CONTRADICTOIRES DU MINISTRE DE LA JUSTICE...

Aveux accablants et contradictoires

Ministre de la Justice, secrétaire d'État à la Sécurité publique, Directeur général, directeur des Affaires judiciaires...ont répondu vendredi aux questions de la Commission Justice et Sécurité du Sénat. Faire toute la lumière autour de la mort de juge Hugues Saint-Pierre - ex-président de la Cour d'appel des Gonaïves - est l'objectif officiel de cette commission dont les travaux risquent de faire très mal à René Magloire.

Le fauteuil du ministre de la Justice est de plus en plus inconfortable après l'annonce par le sénateur Youri Latortue de l'éventuelle interpellation de René Magloire par le Sénat de la République, qui enquête sur les circonstances nébuleuses entourant la mort du juge Hugues Saint-Pierre, ex-président de la Cour d'appel des Gonaïves. « La commission ne peut pas tirer la conclusion qui s'impose, nous allons demander au bureau du Sénat d'interpeller le ministre ! » Le sénateur Latortue, qui est président de la commission Justice et Sécurité du Sénat, a fait cette déclaration à l'issue d'aveux accablants et contradictoires entendus plus tôt dans la journée.

Le ministre René Magloire, son directeur général Josué Pierre, son directeur des Affaires judiciaires, Jean Fallière Bazelais, une conseillère rémunérée par l'USAID et deux de ses secrétaires avaient défilé devant la commission d'enquête. Coup de théâtre ! Le ministre a admis qu'il y a eu effectivement une convocation du président de la Cour d'appel des Gonaïves qui a rendu l'âme dans un centre hospitalier après un accident douteux à la gare du Nord. « Mais la convocation ne venait pas de moi », a vite précisé Me Magloire. Une précision qui a nécessité une suspension de séance pour aller faire chercher deux de ses secrétaires et une conseillère.

« L'ordre de convocation venait de Me Rolande Datis, conseillère du ministre, a dit Mme Augustin, une secrétaire d'expérience du ministère de la Justice. J'ai appelé et j'ai parlé à Marjorie, la fille du juge Hugues Saint-Pierre à partir de son téléphone mobile pour faire part de cette annonce de convocation au Palais de Justice », a-t-elle affirmé. « Jamais je n'ai donné un tel ordre », a juré le témoin devant les membres de la commission d'enquête.

Houleux, le débat s'est bouclé sur une note non amicale et menaçante. « Il existe une grande pagaille au ministère. La commission continue de chercher la vérité cachée sous des déclarations contradictoires», a conclu le sénateur Latortue. L'intervention du sénateur de l'Artibonite a soulevé la colère de Daniel Jean, secrétaire d'Etat à la Justice. « Nous avons été invités à une séance de travail. A mon grand étonnement, la voie qui a été prise est biaisée », (Ndlr : en lieu et place d'une séance de travail, les autorités judiciaires ont subi un interrogatoire musclé).

« C'est une grande déception, a craché de son côté René Magloire, accompagné du ministre chargé des Relations avec le Parlement, Joseph Jasmin. « S'il y a interpellation, je répondrai volontiers, a dit le ministre.» Une séance d'interpellation se termine soit par un vote de censure ou un vote de confiance. Coincé par les journalistes qui montaient la garde au Sénat, le ministre Magloire a dit qu'il réfléchira pour savoir s'il jettera l'éponge avant son éventuelle convocation.

D'aveu en aveux

« La question de la libération de l'ex-député Amanus Mayette, principal inculpé du massacre de La Scierie, a été discutée le 20 avril dernier, lors d'une réunion au bureau du ministre de la Justice, a révélé pour la première fois le sénateur François Fouchard Bergromme devant la commission d'enquête. « Le commissaire du gouvernement de Saint-Marc, Rocky Pierre, le Doyen du tribunal civil de Saint-Marc, Ramon Guillaume, ont assisté, dit-il, à cette rencontre à laquelle il a participé lui aussi. La réunion, qui a débuté au Palais présidentiel, devait parvenir à un pacte de convivialité pour la ville de Saint-Marc, déchirée dans le temps par des affrontements violents.

Deux jours après la mort du président de la Cour d'appel des Gonaïves qui avait ordonné la relance de l'enquête sur le massacre de La Scierie, Amanus Mayette a été libéré après un arrêt de Ramon Guillaune, doyen du tribunal civil de Saint-Marc.

Lors des funérailles du juge Saint-Pierre aux Gonaïves, le ministre de la Justice a été chahuté par des centaines de jeunes en colère et qui lançaient des pierres contre le cortège ministériel.
La PNH marque des points... malgré tout


Après les derniers coups fumants des bandits, la police semble déterminée à ne pas se laisser faire. Plus d'une centaine d'individus, certains dangereux, ont été appréhendés à la capitale et aux Gonaïves.

121 individus, dont des bandits activement recherchés, ont été arrêtés ce week-end au cours de diverses opérations policières menées dans la seule commune de Carrefour. Selon le responsable du commissariat de cette municipalité, Frantz Georges, 37 des individus interpellés l'ont été dans le cadre de l'assassinat de deux policiers, survenu récemment dans le quartier de Lamentin.

Toujours selon l'agent Frantz Georges, l'arme d'un des policiers tués a été retrouvée en possession de Wilkens Fleurentin alias « Toutou », l'un des individus arrêtés. De plus, au cours d'une opération conjointe menée à Carrefour-feuilles, le 24 mai dernier, par la PNH et la MINUSTAH, « Ti David », l'un des chefs de gang de Lamentin, a été tué dans un échange de tirs.

La commune de Carrefour a récemment connu une recrudescence des actes de banditisme. Patrick Jean-Pierre et Rony Jean-Baptiste, deux policiers de la 18e promotion, ont en effet été tués par balles par des inconnus qui ont pris la fuite.. L'annonce du meurtre de ces deux agents a provoqué la colère de certains habitants du quartier de Lamentin qui ont, en représailles, lynché un jeune soupçonné d'être de mèche avec les bandits et incendié un petit marché public. Selon des résidents, ce marché était utilisé comme repaire par les bandits.

Par ailleurs, la PNH annonce l'arrestation lundi de Wilio Jeune, le frère d'Evens Jeune alias « Ti Couteau ». Ce bandit, ancien membre du gang de son frère qui évoluait à Boston, l'un des 34 quartiers de Cité Soleil, était activement recherché par la police. Son arrestation survient au moment où il s'apprêtait à prendre place dans un autobus pour se rendre aux Gonaïves.

Wilfort Ferdinand, alias Ti Will, l'ex-rebelle de l'«armée cannibale», a été arrêté aux Gonaïves dans les locaux d'une station de radio locale. L'ancien homme fort de Raboteau avait reconnu sur les ondes de cette même station qu'il possédait des armes de guerre et qu'il n'était pas prêt à les remettre à la police. Cette arrestation ne s'est pas réalisée sans peine : une personne a été tuée et plusieurs autres ont été blessées.

La capitale haïtienne et certaines villes de province, dont Gonaïves, ont connu ces derniers jours un regain d'insécurité, après quelque mois d'une accalmie relative. Le mardi 22 mai, après avoir été enlevé par des ravisseurs qui réclamaient une rançon de 100.000 dollars, le comédien et publiciste François Latour a été abattu d'une balle dans le ventre. Son corps a été ensuite retrouvé dans les parages de l'entreprise Bâtimat, sur la route de l'aéroport. Serge Adam, propriétaire de Royal Haitian Club situé sur la route de Carrefour, a été enlevé chez lui à Port-au-Prince dans la nuit du mercredi 23 mai 2007. Aux Gonaïves, Alix Joseph, journaliste et directeur de programmation de Radio-Télé Provinciale, a été tué le mercredi 16 mai de 11 balles alors qu'il était en compagnie de son épouse.

Intervenant lundi en marge d'une cérémonie d'installation de deux nouveaux cadres à la Primature, le Premier ministre Jacques-Édouard Alexis a affirmé que son gouvernement ne tolérera aucune zone de non-droit dans le pays. Il a indiqué que la PNH et la MINUSTAH intensifiaient leurs efforts en vue de freiner l'action des bandits.

Alain Gaillard

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