août 31, 2007

VALORISONS LES RESSOURCES DE LA DIASPORA

Engager la diaspora haïtienne dans une citoyenneté plus large


A l'initiative du ministère des Haïtiens vivant à l'Etranger (MHAVE), s'est tenue une série d'activités du 24 au 26 août 2007 au Cercle Bellevue de Port-au-Prince. L'objectif est de renforcer les relations interhaïtiennes.


Le ministre des Haïtiens vivant à l'Etranger, Jean V. Généus, et le directeur du Centre international de documentation et d'information haïtienne, caribéenne et afro-canadienne (CIDIHCA), Frantz Voltaire, ont signé dimanche un accord de partenariat lors de la clôture d'une série d'activités réalisées au Cercle Bellevue de Port-au-Prince. Cet accord porte sur les domaines d'intervention suivants : l'information, la documentation, l'animation scientifique et culturelle, l'édition, la production audiovisuelle et l'éducation générale.

A cette occasion, une centaine d'ouvrages ont été remis à la mairie de Pétion-Ville en vue de la création d'une bibliothèque municipale dans cette commune. Des panneaux thématiques et des films ont été également remis à la Bibliothèque nationale d'Haïti et à la Télévision nationale d'Haïti.

Pour améliorer les relations interhaïtiennes, le ministre Généus annonce le lancement pour cette semaine d'un site internet. Ce qui donnera au ministère la possibilité de réaliser des « visio conférences » au profit de la communauté haïtienne.

M. Généus s'est réjoui de l'amélioration du climat sécuritaire dans le pays. « Le MHAVE est l'un des ministères les plus fragiles, car il n'a que la diaspora pour partenaire incontournable. Quand il y a des troubles dans le pays, les efforts de coopération avec la diaspora tombent à l'eau. Il y a actuellement une amélioration du point de vue sécuritaire, donc il faut encourager les compatriotes à investir dans le pays », affirme le ministre. Continuer >

Au cours d'une conférence-bilan, Frantz Voltaire se dit satisfait des rencontres. « Nous sommes satisfaits, car nous avons pu nous entretenir avec le recteur de l'université d'Etat d'Haïti, Pierre Marie Paquiot, et d'autres recteurs des universités privées du pays. Nous travaillons en vue de contribuer au progrès social et économique du pays. Nous ne sommes pas des donneurs de leçons, nous venons apprendre, entretenir des dialogues avec nos confrères. Dans ce monde de globalisation, il faut que nous ayons des perspectives touchant toute la dimension de nos problèmes sociaux », assure le directeur des Editions CIDIHCA.

L'un des responsables de la mairie de Pétion Ville, Clark Eric, s'est réjoui de ce don de livres fait à sa commune. « Nous sommes heureux de recevoir ce lot d'ouvrages en vue de la construction d'une bibliothèque municipale au profit de la communauté pétion-villoise. Notre commune en a tant besoin et nous avons déjà entrepris certaines démarches auprès d'autres partenaires», déclare-t-il, l'air souriant.

De son côté, ouvert au dialogue et dynamique, Rodney Saint-Eloi plaide en faveur d'un développement durable et réel du pays. « Il faut engager la diaspora haïtienne dans une citoyenneté plus large dépassant le territoire national. Chaque Haïtien doit comprendre qu'il fait partie de la crise du pays. Il revient à chacun de nous de s'unir pour apporter une contribution réelle au développement du pays, car personne d'autre ne peut changer Haïti », confie le directeur général des Editions Mémoire d'encrier.

Jean Max Bourjolly, membre de l'Association des ingénieurs et scientifiques haïtiano-canadiens (AIHC), croit que la tenue des échanges entre les Haïtiens vivant au Québec et ceux d'Haïti est un pas dans la bonne direction. Il souhaite que d'autres communautés soient prises en considération, notamment les Haïtiens vivant en République dominicaine, en France et aux Etats-Unis.

Pour la circonstance, Merès Wèche, critique d'art et romancier, a signé son ouvrage sur Jean-Claude Garoute (Tiga). Un ouvrage qui permet de revisiter la vie et l'oeuvre de Jean-Claude Garoute.

Au menu de ces trois journées d'activités, il y a eu projections de neuf documentaires, tables rondes sur les enjeux spécifiques liés au domaine de l'audiovisuel, de la pédagogie dans l'enseignement de l'histoire et du livre haïtien, vente-signature d'ouvrages d'auteurs haïtiens vivant au Canada, exposition d'ouvrages édités au Canada sur Haïti. Une belle exposition de panneaux thématiques sur l'histoire d'Haïti a fait honneur au public.

INSTITUT SUPÉRIEUR D'ÉTUDES ET DE RECHERCHES EN SCIENCES SOCIALES (ISERSS)

ISERSS ci-devant IERAH : le pari de l'UEH

Le rectorat de l'Université d'Etat d'Haïti (UEH) a des idées à profusion. Pour que son bilan prenne un certain poids, il a misé sur la solution de la crise de l'Institut d'Etudes et de Recherches Africaines (IERA), transformé en ISERSS (Institut Supérieur d'Etudes et de Recherches en Sciences Sociales). Histoire, Géographie, Histoire de l'Art, Sciences Politiques, Archéologie, Tourisme, Patrimoine et Philosophie : autant de départements mis en place pour mieux exploiter la renommée de cette nouvelle structure universitaire. Mais la partie est loin d'être gagnée. Car le budget nécessaire à la réalisation de ce projet est encore dans l'impasse...


«Le choix du programme d'études a été fait à partir d'une analyse ayant indiqué que ces domaines n'étaient pas en duplication avec ce qui était déjà offert par l'UEH», explique le président de la Commission de Restructuration de l'IERA, Dr Michel Philippe Lerebours lors d'un entretien avec le journal. Il admet toutefois qu'il y a des cours de géographie, d'histoire, de Sciences Politiques et de Philosophie dispensés à l'UEH à travers différentes facultés, mais les préoccupations sont autres dans le cadre de ce programme. «La géographie économique, les sciences politiques sont exigées à l'institut National de Gestion et des Hautes Etudes Internationales (INAGHEI). Au niveau de l'Ecole Nationale des Arts (ENARTS), ce sont des cours de formation de base que l'on offre à ceux qui apprennent la pratique de l'art, tandis qu'à l'École Normale Supérieure (ENS), les diplômés sont formés pour enseigner au niveau secondaire les matières apprises comme l'histoire, la philosophie, la géographie», fait remarquer Dr Lerebours qui se propose à l'ISERSS de former des géographes, des historiens, bref un nouveau type d'individus que l'UEH n'a pas encore formés.

Un cursus bien articulé

Un groupe de nouveaux professeurs intervient, avec un profil académique approprié et une compétence reconnue, pour appliquer ce programme basé sur une approche méthodologique impliquant des travaux sur le terrain et des cours sur place, de sorte que les travaux de mémoire soumis par les étudiants soient basés sur des situations concrètes. « Actuellement, la première année constitue un tronc commun à tous les départements. Et le premier semestre est pratiquement à sa fin », indique Dr Lerebours qui annonce la tenue des examens au début du mois de septembre.

Pour sa part, le vice-président de la Commission de Restructuration de l'IERAH/ ISERSS, le professeur Hervé Sylvain souligne que ce programme est basé sur un système de crédits; et il faut à peu près 120 crédits pour l'obtention d'une licence.

« Les cours de concentration seront dispensés dans les 2e, 3e et 4e années et c'est au début de sa deuxième année que l'étudiant est habilité à s'inscrire à l'un des départements », fait savoir M. Sylvain en vantant le mérite du cursus articulé selon une approche méthodologique qui permette la préparation des mémoires qui a toujours constitué un goulot d'étranglement à l'obtention de la licence.

« A l'ISERSS, l'étudiant termine normalement son mémoire à la fin de la 4e année, grâce à la mise en place d'un système d'encadrement formé de professeurs à temps plein, de tuteurs et autres », assure M. Sylvain en faisant état des cours de rattrapage et de mise à jour organisés en vue d'améliorer le niveau des étudiants.

« Mais les profs qui dispensent ces cours depuis plusieurs mois n'ont jamais reçu de salaire. Et cela n'empêche nullement qu'ils se sont toujours présentés à leur travail », apprécie le numéro 2 de la Commission qui voit l'urgence d'aborder la question budgétaire relative au fonctionnement de l'ISERSS.

Une faculté moderne

Installé au début du mois d'août 2006, avec Michel Philippe Lerebours, (président), Hervé Sylvain (vice-président), Franck Ricot et Lucien Jean-Bernard (membres), tous deux anciens doyen et vice-doyen de l'IERA, le nouveau conseil intérimaire n'a trouvé pratiquement aucun moyen en dehors du reliquat des frais d'inscription des étudiants pour faire marcher l'Institution à en croire le numéro 2 du Conseil qui a raison de s'inquiéter de l'avenir du projet de restructuration de l'IERA, devenu ISERSS, au seuil de la rentrée universitaire 2007-2008.

Hervé Sylvain qui n'a pu être en reste quant à la vision du Conseil par rapport à l'ISERSS, dit avoir introduit dans le cursus des cours de langues (français et créole) obligatoires, car les mémoires peuvent être rédigés dans l'une ou l'autre langue. Un petit laboratoire informatique a également été mis en place en vue d'initier les étudiants aux nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC).

« Nous voulons faire de l'ISERSS une structure universitaire moderne, cohérente avec des programmes répondant aux exigences des universités internationales», s'enthousiasme M. Sylvain plutôt inquiet des considérations faites par rapport au nouveau budget de l'ISERSS qui est encore dans l'impasse.

Budget qui est passé de 9.500.000.00 (neuf millions cinq cent mille) gourdes en 2006-2007 à 23.000.000.00 (vingt-trois millions) de gourdes pour l'année 2007-2008. « La nouvelle dynamique à l'ISERSS risque d'être en péril si, au niveau du nouveau budget de fonctionnement, nous n'obtenons pas satisfaction », juge Hervé Sylvain qui s'est dit très motivé pour son travail même si les membres de la commission n' ont pas été rémunérés depuis trois (3) mois.

L'IERAH, à l'origine...

Créé en 1980, suite à une visite en Haïti du président sénégalais Léopold Sédar Senghor en 1976, l'IERA visait à mettre en place un institut appelé à tisser des liens avec des pays du continent africain. L'idée était de développer des recherches sur les Haïtiens en général et ceux descendant d'Afrique en particulier.

« Le sujet des recherches africaines n'est pas une discipline scientifique, mais un domaine de recherche », reconnait le vice-président du conseil de restructuration de l'IERA, déterminé à engager l'institution sur la voie de la formation. Le diplômé de l'IERAH obtenait un certificat de fin d'études africaines après 4 ans.

Mais une fois son mémoire présenté, il décrochait une licence. « Mais, compte tenu du fait qu'il n'y a pas de débouchés réels immédiats pour les diplômés et, conscients que la formation ne répondait pas à un besoin spécifique du milieu: formation sur laquelle il a été soulevé tellement de questions, étant donné qu'on ne peut former des chercheurs en quatre ans, des étudiants ont pris position et sollicité une prise en charge de l'institution.

« Finalement, en 2006-2007, le rectorat a mis en place un groupe de réflexions pour étudier les problèmes et formuler des recommandations », fait remarquer M. Sylvain, tout heureux de souligner que c'est sur la base de ces recommandations qu'a été conçu le programme. En fonction des nouvelles orientations.

Pour une grande faculté des Sciences sociales et humaines

« Les termes de référence de la Commission de Rénovation ont proposé l'application du décret de 1984 qui prévoit une fusion des Facultés de linguistique, des Sciences humaines, d'Ethnologie et de l'IERA en perspective de la création d'une grande faculté des Sciences Sociales et Humaines », précise le vice-recteur aux affaires académiques, Wilson Laleau, dont les idées réformistes au sujet de l'UEH, la vision d'un enseignement supérieur rénové et restructuré exhalent un parfum d'ambiance.

Après l'INAGHEI, l'ISERSS est le miroir des actions concrètes du rectorat de l'UEH - qui ne plaide que par ce projet. Pour saisir les occasions manquées de la réforme des structures publiques de l'université, il faut prendre son temps pour écouter M. Laleau qui ne manque point d'idées généreuses portant sur l'avenir de l'UEH.

«Depuis des années, nous essayons de monter un bureau du Registraire permettant de discipliner le fonctionnement actuel de l'UEH », fait valoir M. Laleau qui reconnait le peu de cas que l'Etat fait de l'enseignement supérieur en Haïti.

« Pour l'instant, l'UEH, c'est une fiction » murmure avec amertume le vice-recteur aux affaires académiques qui s'étonne du sort fait au budget de fonctionnement et d'investissement de l'ISERSS logé provisoirement au local du Collège Métropolitain en attendant la fin des travaux du nouvel immeuble à l'Avenue Christophe.

« Je crois possible le service social généralisé pour tous les étudiants à l'UEH », avance Wilson Laleau qui répondait à une question relative à une éventuelle implication de l'UEH dans la recherche d'une solution au problème d'analphabétisme en Haïti. Idée qu'il n'a cessé de défendre et à laquelle le Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD) adhère volontiers.


Robenson Bernard

PLAIDOIRIE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Plaidoirie contre les violences faites aux femmes
Amos Cincir
cincir2005@yahoo.fr

En Haïti comme un peu partout à travers le monde, les femmes sont victimes de violences. Bon nombre de celles infectées par le VIH/Sida ne sont pas prises en charge. Cette problématique est au coeur des discussions au cours d'un atelier de travail organisé à Moulin-sur-Mer les 28 et 29 août 2007. L'occasion pour les participants de plaider en faveur d'une meilleure prise en charge des femmes victimes et vivant avec le VIH/SIDA.


La violence sexuelle constitue un problème de société assez grave en Haïti, en dépit des efforts des associations de promotion des droits humains et des autorités gouvernementales, ce phénomène continue d'allonger quotidiennement la liste des victimes », s'est indignée la responsable de la section de droits humains au sein de Action aid international, Rose-Anne Auguste. Elle s'exprimait mardi lors de la cérémonie d'ouverture d'un atelier de travail de deux jours réalisé par les responsables de Action aid international (AAI) autour du thème : « Les femmes sont au coeur de la vie, combattons la violence et le VIH/SIDA avec les femmes organisées ».

Selon Mme Auguste, cet atelier s'inscrit dans le cadre d'une campagne internationale de sensibilisation, lancée depuis 2006 par AAI, dans la lutte contre les violences faites aux femmes et la discrimination contre les PVVIH. Cette campagne a pour objectif de formuler et d'améliorer les programmes et les politiques qui entendent combattre le VIH/SIDA et de réduire le taux des violences faites aux femmes.

L'année dernière, Fonds Mondial et PEPFAR ont fournis 60 millions de dollars américains pour lutter contre la pandémie du sida en Haïti. Mme Auguste souhaite que ces fonds soient bien utilisés au profit des personnes nécessiteuses.

Elle a également fait savoir que cette campagne est le début d'une longue bataille. « Il faut du temps et la collaboration de toutes les couches de la population haïtienne pour arriver à combattre cette problématique dans toutes les sphères de la société », a-t-elle ajouté.

Intervenant lors de la première journée, Alejandra Scampini Franco, représentante de Action Aid International au Brésil, a précisé que cette activité a aussi pour but de mettre sur pied un plan national de financement et de lutter contre la stigmatisation dont sont souvent victimes les femmes vivant avec le VIH/Sida.

Mme Auguste a, par ailleurs, soulevé les actes de sauvagerie et de barbarie sur des femmes en prenant l'exemple des pénis trafiqués par les violeurs, des pénis transformés en gourdin en y incrustant des billes en or et en plomb. Continuer >

La responsable de la section des droits humains à AAI, se plaint du fait qu'en dépit de l'ampleur de ce fléau seulement 33 institutions à travers tout le pays soient en mesure d'apporter une assistance aux personnes qui en sont victimes. De plus, elle déplore du fait que l'Université d'état d'Haïti (UEH) étant centre de formation et de recherche ne soit pas en mesure d'effectuer des recherches approfondies et soit incapable d'intensifier des débats à ce sujet.

De nombreux témoignages de personnes séropositives, dont une jeune mère de deux enfants voulant garder l'anonymat, ont marqué l'ouverture de cet atelier. « Je n'ai pas honte d'être séropositive », a-t-elle martelé. Elle a plaidé en faveur d'un engagement actif dans toutes les sphères de la société des PVVIH. Elle invite toutes les personnes de la société à faire un test de dépistage du SIDA en vue de savoir son statut sérologique afin de mieux se comporter.

Mme Auguste a toutefois annoncé que, pour les prochains six mois AAI compte organiser 5 journées de sensibilisation de masse dans plusieurs villes de province notamment Jacmel, Lascahobas, Thiotte, Jérémie et Port-au-Prince. Et du même coup encourager la construction de coalition, établir un partenariat de solidarité avec les organisations de PVVIH au niveau local, national, régional et international afin de définir une politique nationale de sensibilisation en faveur des femmes victimes.

D'autres projets comme : 12 émissions radio Télédiffusées contre la stigmatisation et les violences faites aux femmes, fabrication de 15 grands panneaux publicitaires et l'organisation d'une grande journée de sensibilisation le 30 Novembre 2007 seront prochainement lancés .

Lors des travaux en ateliers, les participants ont fait plusieurs propositions en vue d'améliorer leur sort. « Faire la promotion des droits et des devoirs des femmes victimes de violences et du VIH /SIDA, adopter des mesures contre toutes formes de discrimination et de violences dont elles sont victimes, Créer plus de centres spécialisés pour prendre en charge les personnes séropositives et celles qui sont victimes de violences » sont quelques-unes des propositions faites en la circonstance.

Ont pris part à cette cérémonie, les représentants des institutions suivantes : l'OEA, ONUSIDA, le Ministère à la condition féminine et aux droits des femmes (MCFDF), l'USAID, le Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), le Réseau femmes candidates pour gagner (RFCG), pour ne citer que celles-là.

Les cas de viol sont dans le quotidien des femmes et des filles en Haiti.
-l'Association solidarité des femmes haïtiennes (SOFA), au cours d'un recensement de six mois des centres douvanjou organisé en décembre 2006, a rapporté qu'elles avaient enregistré 396 cas de viol
-Plus d'une cinquantaine de viols ont été enregistrés durant le carnaval 2007.

Amos Cincir
cincir2005@yahoo.fr

DEUX CO- AUTEURS DE L'ASSASSINAT DU JOURNALISTE JACQUES ROCHE ONT ÉTÉ CONDAMNÉS...

Deux des meurtriers condamnés à vie
Alain Gaillard (Nouvelliste)

Deux individus impliqués dans le meurtre de Jacques Roche écopent de la prison à perpétuité. Ces derniers tombent sous le coup du décret du 13 mai 2005.


Jugés par le tribunal siégeant sans assistance de jury pour le meurtre du journaliste, poète et diseur Jacques Roche, les nommés Alby Joseph et Chéry Beaubrun ont été condamnés, ce jeudi, aux travaux forcés et à la prison à perpétuité lors de la session criminelle sans assistance de jury qui se déroule au Palais de justice de Port-au-Prince.

Agé de 22 ans et membre d'un gang qui opérait à Solino, Alby Joseph a reconnu avoir reçu en compagnie de Chéry Beaubrun de l'argent pour surveiller le journaliste lors de sa séquestration. Il a cité les noms des nommés "Gaetan", Tiaboute" et "Bibi" -actuellement en prison - comme les co-auteurs de ce crime.

Au cours des débats généraux, Joseph Fanfan Gédulien, substitut du commissaire du gouvernement, a demandé au tribunal de rendre le verdict condamnant les ravisseurs à effectuer des travaux forcés à perpétuité en vertu des articles 224, 225, 226, 227, 289, 292 du Code pénal, de l'article 293 bis du décret du 13 mai 2005 et de l'article 297 du Code d'instruction criminelle, ce qui a été effectivement retenu par le tribunal présidé par le juge Jean Claude Rigeur et assisté du greffier Charles Robens.

Soulignons que la défense a été assurée par Me Placide Joani

Menottes aux poignets et le corps couvert de marques de torture et de traces de balles, Jacques Roche, 44 ans, a été retrouvé mort le 14 juillet 2005 dans une rue de la capitale, quatre jours après son enlèvement à Nazon. Le journaliste a été exécuté en dépit d'intenses négociations de ses proches avec les ravisseurs; ces derniers exigeaient la rondelette somme de $50.000 en échange de sa libération.

En relation avec ce meurtre, le père Gérard Jean Juste avait été appréhendé le 22 juillet 2005 par la police judicaire. Le prêtre activiste avait été libéré par la suite pour raisons de santé et autorisé à se rendre aux Etats-Unis pour y recevoir des soins. Ce dernier est rentré au pays au cours de ce mois d'août.
Alain Gaillard

LECOMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT RENCONTRE LE COMITÉ JUSTICE DU SÉNAT...

Une bombe désamorcée !


Le commissaire du gouvernement, Claudy Gassant, dont la révocation a été réclamé, a répondu, ce jeudi, à la convocation de la Commission justice et sécurité du Sénat. Sa présence, ajoutée à une série de rencontres engageant le chef de l'Etat et les présidents des deux chambres, désamorce une polémique entre l'Exécutif et le Parlement.


Calvitie prononcée, cellulaire collé à l'oreille...Claudy Gassant a patienté plus d'une heure dans un espace attenant à la salle de séance du Sénat. Dans le même « tribunal » où sa révocation a été réclamée, il y a de cela une semaine, le commissaire du gouvernement est rentré en scène comme pour jouer un rôle dans un feuilleton à rebondissements. Le chef du Parquet de Port-au-Prince s'est mis à l'écoute de Youri Latortue, le président de la commission Justice et Sécurité du Sénat qui, dans une allocution de dix minutes a dit avoir placé les intérêts de la Nation au-dessus de toute polémique.

« Le Sénat est une assemblée de sages, des hommes qui peuvent se montrer à la hauteur... », a dit le sénateur Latortue, tout en expliquant le sens de la séance plénière "boudée" par le commissaire Gassant et au cours de laquelle des parlementaires avaient convenu d'interpeller le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis. Le chef de file de "Latibonit an aksyon", parti régional ayant deux membres au Sénat, a déploré certaines accusations relatives à l'opposition de quelques-uns de ses collègues à la lutte contre la corruption, la contrebande et le trafic de la drogue menée tambour battant par l'administration Préval/Alexis.

« Je peux affirmer que tous les sénateurs appuient la lutte contre la contrebande. C'est un chantier qui doit aller au-delà des quelques interpellations qui ont fait la une des journaux », a déclaré le parlementaire qui a récemment pris le contre pied des déclarations du chef sortant de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti, M. Edmond Mulet. Ce dernier avait vertement demandé aux parlementaires de ne pas faire le jeu des trafiquants de drogue et des contrebandiers en exigeant le renvoi de Claudy Gassant, le chef de la poursuite judiciaire.

« Nous sommes prêts à accorder le bénéfice de l'urgence en votant des projets de loi relatifs à la lutte contre la corruption », a rassuré le président de la Commission justice et sécurité du Sénat qui s'exprimait en présence du ministre de la Justice, René Magloire, et celui chargé des relations avec le Parlement, Joseph Jasmin, qui se faisaient accompagner du commissaire Gassant. « Nous ne perdons pas la face. Nous évitons une crise au pays », a ajouté le parlementaire qui a implicitement désamorcé cette polémique entre l'Exécutif et le Sénat qui menaçait d'interpeller le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis sommé la semaine dernière de révoquer le commissaire du gouvernement pour insubordination.

L'incident est clos ...

« Nous pouvons dire que l'incident est clos. Nous allons travailler dans le sens des intérêts de la Nation », a enchaîné, de manière plus explicite, le président du Sénat, Joseph Lambert. La veille, il avait annoncé un dénouement heureux du conflit alimenté depuis une semaine. Le chef de l'Etat, René Préval, quelques jours après la séance qui a abouti au principe d'interpellation du gouvernement de coalition, avait convoqué une série de réunions avec les présidents de la Chambre des députés et de celle du Sénat.

« Personnellement, je crois qu'il y a eu une mésinterprétation », a indiqué Joseph Lambert, qui récemment, considérait Gassant comme un « monstre en devenir », le fait que le chef du Parquet n'avait pas répondu à la première invitation de la Commission justice et sécurité du Grand corps. Joseph Lambert a tenu a salué l'engagement du commissaire du gouvernement, celui du chef de l'Etat et du Sénat qui évitent au pays « une crise dont les conséquences seraient incalculables ». Un discours convaincant pour ses collègues qui ont participé à la séance convoquée par la Commission justice et sécurité du Sénat, mais pas assez pour calmer la colère du sénateur Fritz Lebon Carlos. « La demande d'interpellation du Premier ministre est un acte constitutionnel. Nous ne pouvons pas faire autrement », a-t-il rétorqué lors d'une conférence tenue parallèlement à la séance.

Gassant dompte le Sénat

Le contentieux vidé, les sénateurs, le ministre convoqué et le commissaire du gouvernement sont rentrés dans le vif du sujet. Dix minutes ont suffi à celui considéré par certains comme agaçant pour emballer l'assemblée, y compris le tonitruant Gabriel Fortuné. « J'ai toujours voulu répondre à la convocation de la commission Justice et Sécurité du Sénat. Malheureusement, il y a eu des barrières. Il y a une différence entre le Magistrat et le simple citoyen que je suis », a expliqué Claudy Gassant.

« Autrefois, on disait que ce sont les juges qui libèrent les kidnappeurs. Aujourd'hui, on prétend que je suis le principal responsable du regorgement des prisons », a dit Gassant qui s'exprimait sur la problématique des détentions préventives prolongées. Quelque 6076 personnes sont entassées dans les dix-neuf centres de détention du pays. Seulement 1079 de la population carcérale ont été condamnés, selon des chiffres cités par le ministre de la Justice qui n'admet pas le concept de « surpopulation carcérale ». Haïti, dit-il de préférence, fait face à un surpeuplement de certains centres d'incarcération.


Claude Gilles
gonaibo73@yahoo.f