janvier 08, 2010

CONNAISSEZ-VOUS VOS DROITS

Avez-vous un casier judiciaire? Que peut-on faire pour se réhabiliter des antécédents criminels ?


Dans toute société organisée et structurée, il existe des normes et des règles qui régissent les rapports entre les autorités et les citoyens. Lorsqu’un problème quelconque survient entre les membres d’une communauté, il revient à la justice de trancher les litiges afin d’en conserver un équilibre social. Le système judiciaire est mis en place pour traiter les comportements antisociaux des individus qui transgressent l’ordre préétabli. Dans le cadre de cette chronique, on envisage d’aborder la problématique de casier judiciaire ou d’antécédents judiciaires sans pourtant utiliser un jargon juridique complexe pour faciliter la compréhension des lecteurs et lectrices de ce blogue. Ce texte a un but éducatif et il ne vise pas à suppléer aux services d’un professionnel qualifié qui possède une connaissance approfondie de la matière.

À bien remarquer, dans un régime démocratique, les droits fondamentaux des citoyens sont respectés et tous les gens sont égaux devant la loi. Ils reçoivent les mêmes traitements devant les tribunaux judiciaires. Ce qui revient à dire que la justice est une pour tous. Dans certains pays, en revanche, la justice est offerte aux plus offrants et les droits des contribuables sont constamment bafoués et méprisés par les autorités compétentes. Les innocents croupissent dans les prisons et les criminels sont en liberté. Que peut-on dire du système juridique canadien?

Au Canada, tous les individus peuvent faire valoir leurs droits devant les tribunaux. La Charte canadienne qui est un instrument juridique constitutionnel, protège les droits à la vie, à la santé, à la protection de la vie privée, à la sécurité et aux libertés publiques de tous les particuliers. Il n’est pas permis à une autorité gouvernementale de porter atteinte à ces droits essentiels enchâssés dans la constitution canadienne. Toute personne lésée dans ses droits, peut porter plainte, intenter un procès contre l’État, se présenter comme témoin, se défendre devant les tribunaux et répondre à une action en justice au niveau civil ou criminel. On ne prétend pas faire un cours de droit, mais on cherche à fournir quelques éléments d’information pour permettre aux membres de la communauté haïtienne de mieux saisir le système juridique de la société d’accueil.

Il est important de noter qu’un procès au criminel engendre des coûts énormes pour le système judiciaire canadien. En matière d’infraction criminelle, près de 90 % de causes ne parviennent pas au procès. C’est le procureur de la Couronne qui intente des actions contre les particuliers violant ou transgressant les lois et les règlements établis. En 2001, les données statistiques révèlent que 2.600.994 hommes et 681.199 femmes avaient un casier judiciaire. Environ 15% de la population canadienne adulte détient un casier judiciaire, avec une proportion de 24% de la population masculine adulte et 6% de la population féminine adulte[1]. Dans les communautés immigrantes, les données statistiques en matière de casier judiciaire sont désastreuses et catastrophiques. Le taux de pourcentage de gens qui ont des antécédents judiciaires est très révélateur au sein de la population noire. De ce fait, il devient nécessaire de considérer le casier judiciaire et ses conséquences comme un enjeu auquel on doit intervenir pour tenter d’éduquer et de sensibiliser la communauté haïtienne.

Qu’est-ce qu’on entend par casier judiciaire? C’est la liste complète des condamnations prononcées contre une personne par les tribunaux pour une infraction à une loi fédérale (comme le Code criminel) ou à ses règlementations sur les drogues. Pour être plus précis, il s’agit d’un fichier contenant la liste des condamnations pénales, corroborées par les empreintes digitales d’une personne [2]. Le registre contenant ces fichiers est administré par la Gendarmerie Royale du Canada (GRC) dans lequel on conserve de l’information sur les personnes trouvées coupables d'avoir commis une (ou des) infractions criminelles en contravention de lois telles que le Code criminel et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Les infractions aux lois pénales provinciales (Code de la sécurité routière) ne donnent pas lieu à un casier judiciaire. Il est bon de noter que seules les personnes majeures peuvent avoir un casier judiciaire. Les jeunes contrevenants qui commettent des infractions criminelles, n’auront pas de casier judiciaire à moins que leur dossier ne soit déféré devant le tribunal pour adultes. Ce qui revient à dire, si une personne avait moins de dix-huit ans au moment d'une infraction, son dossier judiciaire deviendra inaccessible après un certain temps (sauf s'il s'agissait d'une infraction grave par exemple: meurtre, voies de fait graves, agressions sexuelles graves).

Quel est but d’un casier judiciaire? À chaque fois qu’une personne est déclarée coupable d’une infraction criminelle, il est constitué un casier judiciaire à son nom. Le but de ce dernier consiste à conserver une trace de l’infraction ou de la condamnation afin de servir à justifier une sentence plus sévère en cas de nouvelles infractions. En réalité, le casier judiciaire entraîne des conséquences néfastes qui peuvent nuire à l’épanouissement d’une personne. De façon générale, au moment de l’imposition d’une sentence, une personne qui a déjà à son compte un antécédent judiciaire sera traitée plus sévèrement qu’une personne qui n’a pas fait l’objet de condamnation antérieure. Le casier judiciaire est l’outil qui permet de savoir qui a des antécédents judiciaires et qui n’en a pas. Il peut vous empêcher d’occuper un emploi relié à la sécurité, aux finances; être élu maire ou député; devenir avocat, juge, policier, etc. Le casier judiciaire peut vous empêcher d’être membre d’un ordre professionnel, d’obtenir des licences ou permis, de vous causer des ennuis pour voyager dans certains pays, par exemple : les États-Unis.
Autrefois, le casier judiciaire d’un individu trouvé coupable marquait son dossier toute sa vie. Maintenant, il est possible d’obtenir une réhabilitation, souvent appelée le Pardon. Il est important de souligner que les antécédents judiciaires pour une infraction mineure, même après plusieurs années, ne disparaissent pas automatiques. La personne qui désire que son casier soit classé à part dans le système du Centre d’information de la police canadienne (CIPC) doit faire une demande de réhabilitation. Cependant, il est utile de souligner qu’il y a des délais d’attente du retrait ou de la suppression du casier judiciaire. Sauf exceptions, les casiers judiciaires sont normalement conservés jusqu’au moment où le contrevenant atteint 80 ans [4]. À cet âge, le casier judiciaire est alors supprimé, à la condition que la personne n’ait pas commis d’acte criminel au cours des dix dernières années. En matière pénale, il existe deux cas où le casier judiciaire est effectivement supprimé, à moyen terme. Il s’agit bien des sentences d’absolution conditionnelle et inconditionnelle (sous conditions). Dans le cas d’une infraction où la personne coupable obtient une sentence d’absolution inconditionnelle, on doit attendre une période de 1 an après la date de l’imposition de la sentence pour effectuer la demande de réhabilitation. Cependant, dans le cas d’une sentence d’absolution conditionnelle, une période de 3 ans doit s’être écoulée après la date de l’imposition de la sentence. Si vous étiez coupable d’une infraction sommaire, le pardon peut vous être délivré 3 ans après avoir purgé la totalité de la peine [5]. Alors que si vous étiez condamné suite à une procédure de mise en accusation pour un acte criminel, le pardon peut vous être délivré 5 ans après avoir purgé la totalité de la peine.
On est conscient que le contenu de le présent texte touche, d’une manière ou d’une autre, plusieurs membres de la communauté haitienne d'ici. Certaines familles s’inquiètent de l’avenir de leurs jeunes adolescents, empruntant un chemin dangereux qui les entraînent parfois en prison. Ce sont les conséquences nébuleuses des actes criminels, souvent difficiles à accepter, auxquelles certains parents doivent y faire face dans la communauté. On ne peut pas ignorer que certains de nos jeunes qui refusent d’aller à l’école, se laissent entraîner dans la drogue et commettent des actes de banditismes qui pourront hypothéquer leur avenir dans ce pays. Devant l’inquiétude manifeste des parents éprouvés par les difficultés de leurs jeunes, il est urgent de chercher à intervenir pour leur offrir un support ou leur fournir de l’information appropriée afin d’apaiser leurs souffrances. C’est la raison pour laquelle on a jugé nécessaire d’aborder cette problématique afin d’éduquer les gens de la communauté sur les réalités du système pénal canadien. C’est de cette manière qu’on essaie de contribuer au mieux-être de notre milieu, en évitant d’aborder les sujets qui nous divisent profondément. Enfin, il revient à chaque professionnel haïtien de mettre son expertise au service de la collectivité, pour qu’ensemble, on arrive à construire une communauté forte et responsable pour la génération future.

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[1] Internet. [http://www.casierjudiciaire.ca/html/casier.html] Extrait tiré du site Web traitant du casier judiciaire, consulté le 10 décembre 2009.
[2] Internet. [http://www.educaloi.qc.ca]. Educaloi, site Web consulté le 10 décembre 2009.
[3] Internet. [http://www.justice.gc.ca]. Ministère de la justice, SiteWeb, consulté le 8 décembre 2009.
[4] Ibid, site Web sur le casier judiciaire, consulté le 10 décembre 2009.

[5]Ibid, Site Web Educaloi, consulté le 10 décembre


Jean-Marie Mondésir
Juriste haitien
Spécialiste en droit civil

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