mars 22, 2007

QUAND ON MET SUR LES VERROUS UN BARRON IL FAUT ASSISTER SES PROTÉGÉS POUR AVOIR LA PAIX...

Evens en taule, ses protégés assistés !

Texte tiré du quotidien: Le nouvelliste

Roberson Alphonse



Evens Jeune est sous les verrous. Sur ses terres, à Boston, c'est la consternation. Cependant, la MINUSTAH qui l'a délogé offre une assistance humanitaire à la population de son quartier. Pure coïncidence.


Evens Jeune, alias « Ti kouto » a été capturé aux Cayes. Mardi matin, des agents de la PNH ont mis fin à sa cavale. Le président René Préval s'en est félicité tout en rappelant avoir tendu, mi-2006, le rameau d'olivier aux chefs de gangs afin qu'ils intègrent le DDR.

Pourtant, 24 heures après cette interpellation, dans le fief d'Evens, à Boston, l'un des 34 quartiers de Cité Soleil, c'est la consternation. On déplore la perte d'un « protecteur ».« Nous sommes finis », lâche une femme d'une quarantaine d'année qui n'arrivait pas à contenir ses larmes. Hier soir, quatre hommes venus de Brooklyn ont violé une jeune fille, déplore t-elle. Le viol, appelé « benzawa » par des jeunes filles de la zone est maintenant aussi redouté que les incursions des assaillants venus des autres quartiers du bidonville.

Parallèlement à ces craintes nées des rivalités passées, les habitants de Boston regrettent aussi, avec l'arrestation d'Evens, la perte d'une « aide humanitaire et financière ». «Chaque jour, 400 personnes avaient droit à un plat chaud. Certains d'entre nous recevaient de l'argent de lui pour payer l'écolage de nos enfants », explique une autre femme au teint clair qui se présente comme cuisinière à une cantine populaire gérée par Evens. « Lorsqu'il obtenait de l'aide des organisations non gouvernementales, il ne la gardait pas pour lui », poursuit-elle en rejetant d'un revers de main toute implication du « commandant » dans les actes de kidnapping.

Alors qu'elle crachait sa colère contre des lieutenants d'Evens qui le détestaient parce qu'il ne voulait pas qu'ils volent, tuent et kidnappent, une musique interrompt sa diatribe. « Ce sont les blancs de la MINUSTAH. Ils font la fête », affirme-t-elle en passant en revue ce qu'elle appelle les exactions commises par les blancs dans le quartier.

En empruntant un corridor escarpé aux murs transpercés de balles pour arriver là où venait la musique, des Casques bleus offraient plutôt de la nourriture et une assistance médicale aux gens qui en ont besoin.

Sur fond d'un hit de Raram, « Gaye pay », ils ont distribué 1.000 bouteilles d'eau et 500 sandwichs, selon le responsable de l'opération, le capitaine Smitz.

Selon cet officier de nationalité brésilienne, des réunions se tiendront bientôt avec les leaders communautaires afin d'identifier les problèmes. « Maintenant que le quartier est sécurisé, il faut aider la communauté à sortir de la misère », dit-il en ayant un oeil sur le déroulement de cette opération rendue possible grâce aux infrastructures laissées par Evens Jeune. « On projette de transformer ces locaux en un centre communautaire où l'on dispensera des soins de santé. Il y aura aussi de la nourriture".

Par ailleurs, une école professionnelle sera créée et des leçons d'Espagnol, de Portugais, d'Anglais seront dispensés, assure le capitaine Smitz.

En proie à une misère infrahumaine, la population de Cité Soleil doit aujourd'hui bénéficier d'un leadership responsable pour remplacer celui d'Evens, explique un analyste en sciences sociales.

Selon lui, les conditions qui ont créé Evens existent encore à Cité Soleil. Il s'agit tout simplement de l'absence de l'Etat dans la vie et le quotidien des gens.

Exposé à l'agression d'individus venus des autres quartiers pour une raison quelconque, un autre jeune de Boston suivra les traces de Evens. Il tuera pour se protéger, souligne-t-il en questionnant d'un autre côté le cynisme des uns et des autres qui s'enrichissent en sollicitant de l'aide pour le compte de Cité Soleil.

Conseillant aux autorités de rétablir la présence de l'Etat, à travers ses services à la population, ce spécialiste a appelé à la fin de l'hypocrisie sciemment entretenue dans les discours politiquement corrects sur ce bidonville où vivaient jusqu'à tout récemement plus de 300.000 personnes.

Cité Soleil où des Casques bleus de la MINUSTAH essuyaient des tirs quotidiennement, selon les porte-parole de la mission onusienne, est en passe d'être sécurisée complètement. Peu d'arme ont été saisies jusqu'ici. Mais on constate une occupation presque totale de la Cité par les soldats onusiens. Des soldats qui ont traqué et contraint à la fuite Amaral Duclona, Bélony et Evens Jeune. Ce dernier s'est vu mettre un terme à sa cavale, à Laurent, une localité des Cayes, au sud d'Haïti.


Roberson Alphonse
robersonalphonse@yahoo.fr

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