Le juriste haïtien vient de prendre connaissance d'un présumé de cas de viol sur une mineure où aucun document écrit, aucun rapport médical ni aucun rapport de police n'a fait mention de cette infraction. On se demande sur quels éléments de preuve que le juge s'est basé pour rendre son verdict de culpabilité. C'est désolant de constater l'état pitoyable de la justice en Haiti où il existe un déni du droit élémentaire de l'accusé. On n'a du mal à expliquer le comportement du ministère public qui cherche à condamner une personne sur une simple déclaration sans être muni d'un rapport médical justifiant la violence de l'acte présumé. À mon avis, une infraction criminelle ne doit pas être traitée à la légère dans une société de droit, surtout pour les cas de viols qui sont très fréquents dans les camps à la suite de la catastrophe du 12 janvier 2010. Cependant, on ne peut pas accepter non plus une parodie de justice dans un pays démocratique où les juristes font fi des règles élémentaires de l'administration de la preuve. Les faits relatés dans l'article ci-dessous extrait du nouvelliste en ligne se laissent à désirer et la condamnation du présumé violeur mérite d'être réévaluée par une instance supérieure. Je crois que le barreau de Port-au-Prince doit intervenir pour assumer ses responsabilités lorsque ce genre de cas se présente. Le verdict du juge n'a aucun fondement puisqu'il n'a pas tenu compte de l'ensemble du dossier. Bonne lecture ... (Commentaire de Jean-Marie)
Ouverture de la session criminelle sans assistance de jury
Sur les ruines du Palais de justice, le lundi 12 juillet, la doyenne du tribunal de première instance de Port-au-Prince, Me Marie Joceline Cazimir, a ouvert la session criminelle sans assistance de jury. Le commissaire du gouvernement Harrycidas Auguste faisait office de ministère public.
Pour cette première journée, trois personnes ont été jugées et condamnées. Il s'agit de Sabrina Pétiote et Jeanine Joseph, accusées de trafic illicite de stupéfiants (condamnation : 36 mois de travaux forcés) et de Peterson Janvier pour crime de viol sur une mineure, condamné à trois ans de travaux forcés.
Haïti: Edith Jean-Pierre n'avait pas encore 18 ans lorsque Peterson Janvier l'a violée chez lui. Il a déchiré le maillot de la victime, avant de commettre son forfait. Suite à cet acte odieux, barbare, Peterson Janvier a été arrêté sur plainte d'un proche parent de la victime qui aurait dû naturellement le faire.
René Bertrand et Joseph Wilsame qui ont été cités dans cette affaire ont, après interrogatoire, bénéficié d'une ordonnance de non-lieu du juge instructeur, alors que Peterson Janvier a été renvoyé devant le tribunal criminel pour y être jugé pour crime de viol commis sur une mineure de 17 ans. Et il a comparu le lundi 12 juillet, à l'occasion de la première journée d'audience criminelle sans assistance de jury, pour connaitre de son sort. Il a écopé d'une condamnation de trois ans de travaux forcés avec bénéfice de la loi Lespinasse relative à la détention préventive prolongée.
Lorsque Peterson a été arrêté par la police, il avait reconnu avoir eu des relations sexuelles avec Edith Jean-Pierre. L'accusé avait bien expliqué au policier qui l'interrogeait que ce n'est pas la première fois qu'ils ont eu de rapports sexuels. D'ailleurs, Edith est son amante, a-t-il laissé entendre.
Au cabinet d'instruction, il a tenu les mêmes déclarations. Pour en savoir davantage, le magistrat instructeur a invité la victime à plusieurs reprises à son bureau, cette dernière ne s'était jamais présentée. Mais pendant le déroulement de l'instruction, Peterson Janvier a tenu à faire remarquer au juge que l'acte a été commis avec le consentement de son amante. Mais ce que le juge d'instruction a retenu dans les déclarations de Peterson janvier, ce qui paraissait important dans le dossier, c'est la véracité avec laquelle il a relaté comment les faits se sont déroulés. L'accusé a admis que Edith Jean-Pierre, son amante, est plus jeune que lui. Mais il n'avait pas la preuve qu'au moment de la commission de l'acte, elle n'avait pas encore atteint la majorité civile. Peterson ne pouvait pas le savoir sans avoir sous les yeux l'acte de naissance d'Edith Jean-Pierre.
Au tribunal, l'accusé n'a pas menti. il a repris les mêmes déclarations comme si elles avaient été enregistrées sur une cassette.
Le fond de ce procès est de savoir si la mineure avait la conscience lucide, si elle avait mesuré les conséquences de l'acte : maladies infectieuses, grossesse prématurée...On n'a pas pu savoir tout cela.
En dépit des nombreuses invitations, la victime était restée chez elle, attendant la condamnation de Peterson Janvier pour viol commis sur sa personne. Sa présence au tribunal aurait contribué à animer davantage les débats. Donc, pas de partie civile pour réclamer dommages-intérêts, pas de témoins présents à l'audience, pas de corps de délit, pas de certificat médical, pas d'acte de naissance. Malgré tout, Peterson Janvier a été condamné à trois ans de travaux forcés.
Dans son réquisitoire, le ministère public, protecteur né des mineurs, a sollicité du tribunal de faire application de l'article "2" du décret du 11 août 2005 modifiant le régime des agressions sexuelles et de condamner l'accusé à 10 ans de travaux forcés pour avoir violé la mineure Edith Jean-Pierre dans la soirée du 16 au 17 mai 2009.
Le conseil de la défense, composé de Mes Gerty Léon Alexis et Jacqueline Elie, a, d'entrée de jeu, fait remarquer au tribunal que Peterson Janvier avait rencontré Edith dans la perspective de planifier un programme pour la journée du 18 mai, à l'occasion de la fête du drapeau.
Il n'y a pas eu de viol. Qui peut prouver que la victime était mineure ? Où est son acte de naissance ? s'interroge le conseil de la défense. Il n'y a eu ni violence ni contrainte, poursuivent les avocats de Peterson.
Au cours des débats généraux, le conseil a attiré l'attention du tribunal sur le fait que l'accusé n'a pas été appréhendé sur plainte de la victime, mais bien sur celle d'un proche parent. Une façon de porter le tribunal a rejeté la thèse de viol avancée par le ministère public. Le conseil de la défense a également insisté sur l'absence de certificat médical, pièce maîtresse pouvant établir s'il y avait effectivement viol, et de procès-verbal de flagrance. L'infraction de viol n'est pas établie. L'absence des éléments matériels et intentionnels en sont la preuve, a indiqué le conseil de la défense.
Fort de ces considérations, le conseil de l'accusé a demandé au tribunal de déclarer non constant le fait de viol mis à la charge de Peterson Janvier et de faire appliquer l'article 290 du Code d'instruction criminelle annoté par Me Menan Pierre-Louis.
Reprenant la parole, le ministère public, représenté par Me Harrycidas Auguste, a brandi un acte de désistement signé par les parents de la victime, rédigé par un notaire, comme pièce à conviction. Et il s'est renfermé dans ses conclusions, savoir la condamnation à 10 ans de travaux forcés de l'accusé Peterson Janvier.
Ayant toujours la parole en dernier, le conseil de la défense a insisté sur l'absence de certificat médical, document important dans un pareil procès, de même que le procès-verbal de flagrance. S'adressant directement au représentant du ministère public, le conseil de l'accusé a fait remarquer à ce dernier qu'un acte de notoriété ne saurait remplacer un acte de naissance.
Dans sa décision, le tribunal criminel a déclaré constants les faits de viol reprochés à Peterson Janvier. Cependant, il a rejeté la thèse selon laquelle Edith Janvier est mineure. N'empêche que le tribunal criminel a condamné Peterson Janvier à trois ans de travaux forcés avec bénéfice de la loi Lespinasse sur la détention préventive prolongée.
Deux autres accusées
Le juge Carvès Jean n'a pas eu la tâche facile. Mais l'expérience aidant, il a pu tirer son épingle du jeu.
Sabrina Pétiote et Jeanine Joseph sont accusées de trafic illicite de stupéfiants. Elles ont été entendues le lundi 12 juillet au cours d'une audience criminelle. Après avoir suivi attentivement les réponses des accusées aux questions du tribunal, le juge Carvès Jean a prononcé sa décision séance tenante. Il a condamné les accusées à 36 mois de travaux forcés chacune.
Rappelons que le tribunal était formé de Carvès Jean (juge), Félix Léger (ministère public), Kery Sémervil (greffier) et Romuald Grand-Pierre (huissier).
juillet 14, 2010
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire