Pour combattre la détention préventive prolongée
Une « Commission nationale de Détention » vient d'être créée par le Ministère de la Justice et de la Sécurité publique. Cette commission, comme celles qui l'ont précédée, doit évaluer les causes du phénomène de la détention préventive prolongée et faire des suggestions ou des propositions aux pouvoirs publics. Propositions qui ne seront pas retenues comme des recommandations.
A l'initiative du Ministère de la Justice et de la Sécurité publique, une commission dénommée « Commission nationale de Détention » vient d'être formée avec pour mission «de réfléchir et de faire des propositions visant à réduire le phénomène de la détention préventive prolongée ». Fait important à signaler : l'annonce de l'existence de cette commission survient ce mercredi 10 décembre 2008, date marquant le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et commémorant la « Journée mondiale des droits de l'homme ».
Cette commission de sept membres présidée par le Secrétaire d'Etat à la réforme de la justice, Me Daniel Jean, doit avoir en son sein d'autres personnalités issues tant du secteur de la justice que de la « société civile » organisée, a fait savoir le ministre de la Justice et de la Sécurité publique, Me Jean-Joseph Exumé. Feront partie de cette commission, entre autres, un représentant du ministère public, un de l'office de Protection du Citoyen (OPC), deux du secteur des droits humains. Pour un mandat d' un an renouvelable, les membres de la « Commission nationale de Détention » devront « évaluer le système carcéral et le système judiciaire haïtiens».
Selon les statistiques, le taux de détention préventive prolongée en Haïti avoisine les 80%.
« La Commission devra faire des propositions aux pouvoirs publics relatives à la mission qui lui a été attribuée, mais ces propositions ne seront pas considérées comme des recommandations », a tenu à préciser le ministre, comme par exemple fixer les limites des attributions des commissaires.
Une liste de sept personnalités devant faire partie de cette commission, issues du monde judiciaire, politique et du secteur des droits humains a été distribuée à la presse au cours de cette conférence annonçant la formation de cette commission. Cependant, un arrêté présidentiel à paraître bientôt doit officiellement les nommer. C'est pourquoi il a été demandé aux confrères de mettre sous embargo cette liste. Parmi les noms placés sur cette liste, on retrouve des figures ayant participé à plusieurs commissions de la période de transition politique à aujourd'hui.
Interrogé sur le « Service d'inspection judiciaire », une entité créée par le décret du 22 août 1995 réorganisant le système judicaire haïtien avec pour mission d'inspecter les instances distributives de la justice à travers le pays, mais qui n'a jamais été opérationnalle, le ministre a laissé entendre que « qu'il n'y aura ni duplication, ni remplacement, ni empiètement ». A propos des critères de sélection des membres de la commission, Me Exumé a laissé entendre qu'ils ont été choisis « en fonction de leurs actions et de leurs engagements à la cause des droits de l'homme, ainsi que de leur moralité ».
« La commission va se charger seulement d'évaluer les causes du phénomène de la détention préventive pour finalement proposer des solutions appropriées », a dit M. Exumé.
De manière implicite, le ministre de la Justice a énuméré les causes principales du phénomène de la détention préventive prolongée qui provoquent, à son avis, « le dysfonctionnement du système judiciaire, le dysfonctionnement du système carcéral, les conditions de détention, la capacité de l'Etat à gérer le système, la faiblesse de l'Etat en général ».
En ce qui a trait aux droits humains, Me Jean-Joseph Exumé estime que l'Etat haïtien fait des progrès en matière du respect des droits civils et politiques et reconnaît que les droits économiques, sociaux et culturels sont en reste en raison de « la faiblesse de l'Etat et de son incapacité à tout embrasser » en même temps.
« Il y a des progrès, car l'Etat haïtien ne viole plus de manière systématique les droits humains », a-t-il dit, faisant allusion aux « tortures et autres formes de violences » exercées contre des citoyens par des instances de l'Etat dans un passé encore récent.
Cette commission fait suite à plusieurs autres qui l'ont précédée et qui ont produit toutes des suggestions et recommandations. Souhaitons que cette commission ne soit pas une de plus. Une de trop !
Samuel BAUCICAUT
samuelbaucicaut@lenouvelliste.com
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