Haïti: Des conditions de détention exécrables...
Promiscuité débordante, insalubrité criante, abscence de soins médicaux, sous-alimentation... sont le lot des milliers de détenus qui croupissent dans les prisons haïtiennes. Un récent rapport de Panos Caraïbes sur la tuberculose et le Sida dans les centres carcéraux haïtiens met à nu ce décor odieux du système pénitencier du pays.
Les conditions de détention dans les prisons haïtiennes sont éxécrables. La population carcérale augmente à un rythme vertigineux, tandis que la capacité d'accueil des détenus diminue. En 2004, l'espace carcéral s'étendait sur une superficie de 6 440 mètres carrés et le ratio mètre carré par détenu était de 1,84. En octobre 2008, on dénombrait entre 8 000 et 8 272 détenus dans les 17 établissements pénitentiaires du pays. En cinq ans, la population carcérale haïtienne a augmenté de 23%. « Ce qui fait que l'espace de détention s'est réduit à seulement 0,64 mètre carré par détenu tandis que les normes internationales en prévoient 4.50 mètres carrés par détenu », note le rapport de Panos Caraïbe intitulé Tuberculose et Sida dans les prisons haïtiennes.
« Outre la détention préventive, qui est un mal endémique dans notre système carcéral, les prisons sont surpeuplées, les détenus sont empilés les uns sur les autres comme des sardines », lit-on dans le rapport de Panos Caraïbes. « Faute d'espace, écrivent les auteurs du rapport, dans certains centres de détention, les détenus dorment par relève. D'autres fabriquent des hamacs de fortune pour se coucher. »
Dans une telle promiscuité, les détenus purgent une double peine. Ils sont sujets à toutes sortes de maladies, notamment la tuberculose et le Sida. « Il n'existe à ma connaissance aucun programme de prise en charge des personnes vivant avec le Vih/Sida en milieu carcéral, ni aucune organisation travaillant dans ce domaine », déclare le Dr Joëlle Deaz, responsable du programme national de lutte contre le Sida, cité par Panos Caraïbes, ajoutant : « Aucune étude n'a jamais été publiée sur cette problématique ».
Les prisons sont des réservoirs de tuberculose qui guettent non seulement les prisonniers, le personnel des prisons, mais aussi les visiteurs et la société civile toute entière, estiment de leur côté les experts de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans ce rapport. De juillet 2007 à novembre 2008, quelque 13 détenus atteints de turberculose ont été soignés au Sanatorium. Parallèlement, de janvier à août de la même année, 45 cas de décès ont été enregistrés au Pénitencier national. Les causes de ces décès n'ont pas été divulgués par les responsables de la Direction de l'Adminstration pénitentiaire (DAP). « La sous-alimentation des prisonniers et les manquements au niveau sanitaire », sont quelques-unes des causes avancées dans le rapport comme étant responsables de cette situation.
En outre, le Vih/Sida reste un sujet préoccupant. Pas étonnant que certains détenus soient infectés dans leur cellule. « Certaines pratiques, notamment la promiscuité et les petites chirurgies clandestines pratiquées par les détenus pour introduire des corps étrangers dans leur pénis font du milieu carcéral une source d'infections au VIH/Sida », fait remarquer la millitante des droits humains Marie Yolène Gilles, interviewée par Panos Caraïbes.
Les rapports sexuels clandestins dans les prisons constitueraient un moyen de propagation du Vih/Sida. « L'homosexualité est présente dans les prisons haïtiennes, malgré son ignorance par les autorités et l'interdiction des rapports sexuels par les règlements des prisons », souligne le rapport de Panos Caraïbes. Les détenus n'ont pas d'autres choix que de recourir à l'homosexualité puisqu'ils sont regroupés par sexe. La catégorisation des détenus en fonction de leur sexe, encourage fortement l'extension de l'homosexualité dans les centres carcéraux. Certains détenus, souligne le rapport, deviennent la proie de cette pratique sous les contraintes et menaces de leurs pairs. Les auteurs du rapport ont aussi noté que les pénétrations anales, les drogues injectables favorisent la contamination et l'expansion de cette maladie infectieuse.
La prison un lieu de violence
La prison est une jungle où le plus fort impose sa loi au plus faible, au grand dam des policiers. Le prisonnier qui a un pouvoir économique et politique réclame souvent obéissance et respect à ses camarades de cellule. « Dans ce petit royaume, il fait ce qu'il veut, témoigne un ancien détenu à Panos Caraïbes. Il peut décider de punir ou d'expulser, de donner à manger ou non, selon son gré. »
Cette même sanction, ajoute le rapport, s'applique aux prisonniers sur qui pèsent des soupcons d'avoir le VIH/Sida et la tuberculose, auxquels l'accès aux médicaments et aux soins de santé n'est pas facilité. Les chefs autoproclamés décident qui sont malades ou ne le sont pas. Les médicaments pourront être détournés au profit de ceux qui sont pourvus de moyens économiques.»
L'amélioration des conditions dans les centres carcéraux ne se fait pas du jour au lendemain. Les organisations des droits humains le savent bien. Beaucoup d'efforts doivent être consentis pour le respect des droits des détenus en Haiti. Car, selon le responsable du CARLI, Me Renan Hédouville, cité dans le rapport de Panos Caraïbes, les détenus infectés au Vih/Sida dans les centres de détention devraient pouvoir traduire l'Etat en justice pour n'avoir pas su adopter des dispositions garantissant leur sécurité physique et morale. Ceci constitue une violation flagrante de leurs droits.
Géralda Sainville
mai 31, 2009
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