mars 30, 2007

LA MINUSTAH, SERAIT_ELLE AU-DESSUS DE LA LOI ?

La MINUSTAH serait-elle au-dessus de la loi ?


La loi sur l'assurance véhicules contre tiers est d'ordre public (Art. 113). C'est-à-dire, qu'elle ne peut être sujette à dérogation. Tout véhicule à moteur circulant sur le territoire de la République a pour obligation de se soumettre aux prescrits de cette loi, à savoir, prendre un contrat d'assurance de l'Office d'assurance véhicules contre tiers (OAVCT). Ce n'est pas le cas pour la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) qui n'a aucun de ses véhicules assurés à l'OAVCT. La MINUSTAH serait-elle au-dessus de la loi?

« Les véhicules de la Mission des Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH) ne sont pas assujettis à la réglementation haïtienne en matière d'immatriculation et de certification, mais doivent être couverts par l'assurance en responsabilité civile .» C'est ce que prescrit l'article 13 de l'accord du 9 juillet 2004 entre l'Etat haïtien et la MINUSTAH.

C'est-à-dire que la mission des Nations unies en Haïti n'est pas astreinte à adopter l'immatriculation selon les normes en vigueur, cependant elle n'est pas exemptée de l'obligation qui est faite à tout propriétaire ou conducteur de véhicule en Haïti de prendre un contrat d'assurance à l'OAVCT.

Responsabilité civile pour la MINUSTAH

Pour le cas de la MINUSTAH, couverte par l'immunité diplomatique, le contrat avec l'OAVCT doit être une assurance à responsabilité civile, car les éléments qui composent cette mission internationale ne sont pas justiciables devant les tribunaux haïtiens. L'Article 7 de la loi portant sur l'assurance véhicules contre tiers stipule : « Le contrat d'assurance couvre la responsabilité civile du propriétaire du véhicule assuré et de toute personne autorisée et de ses ayants cause. En vertu de cette disposition, toute victime d'un accident de circulation a droit à un dédommagement dans les limites du plafond de l'assureur, moyennant l'établissement de la responsabilité civile par voie amiable ou judiciaire et ce, sans préjudice des poursuites légales contre la partie fautive .»

Et l'article 10 de cette même loi souligne que « l'assurance responsabilité civile s'applique aux accidents de la circulation causés par les véhicules à moteur, c'est-à-dire tout engin circulant au sol, mû par un combustible quelconque ou l'énergie hormis les tramways, les véhicules de chemin de fer et les véhicules de guerre ».

jusqu'à aujourd'hui, aucun véhicule de la MINUSTAH ne dispose d'un contrat d'assurance avec l'institution étatique préposée à cet effet. Cependant, la première mission des Nations Unies en Haïti, qui a suivi le retour d'Aristide en 1994, MINUHA, avait assuré tous ses véhicules à l'OAVCT.

Véhicules non assurés : dangers publics ...

La circulation des véhicules de la MINUSTAH, de la Police Nationale d'Haïti (PNH) ou de tout autre conducteur - non couverts par l'OAVCT - sur les routes haïtiennes peut causer préjudice aux autres usagers dans le cas d'un accident de la circulation. « C'est frustrant et même injuste, explique un cadre de l'OAVCT, qu'un propriétaire de véhicule, par exemple, qui paie régulièrement son assurance depuis plus de dix ans et qui, un jour, entre en collision avec un autre utilisateur de la route qui, pour son malheur, n'est pas en règle. Le premier n'obtiendra malheureusement pas de réparation.»

C'est là qu'intervient la mission de la police routière qui doit s'assurer que tous les véhicules circulant sur les routes haïtiennes sont conformes aux normes qui régissent la matière, notamment pour ce qui a trait au contrat d'assurance, garantie de sécurité pour tous les usagers de la route. Parce que le schéma de l'assurance véhicule contre tiers se présente comme suit : « L'assurance véhicules contre tiers est une assurance contre les accidents de la circulation seulement. C'est un contrat conclu entre l'OAVCT et le propriétaire de la voiture, au profit d'une éventuelle victime appelée Tiers. » (Art. 5.)

A la mode de la MINUSTAH

Les cas d'accident impliquant des véhicules de la MINUSTAH sont classés dans la rubrique des dossiers irrecevables à l'OAVCT. Quelle que soit la situation. Que le tort revienne à la MINUSTAH ou à l'autre partie, le traitement du dossier ne sera pas différent à l'OAVCT. Parce que ce dernier n'a aucun contrat avec la MINUSTAH.

Cependant, selon les informations que nous avons recueillies, il arrive certaines fois que des conducteurs victimes d'accidents avec des véhicules de la mission onusienne obtiennent réparation auprès de cette dernière. Mais c'est en dehors des prescriptions de la loi. La MINUSTAH procède comme suit, selon ce que nous a rapporté un employé de l'OAVCT: elle vous fait venir dans sa base, constate l'accident, fait le jugement et si le verdict est en votre faveur, elle couvre les frais de réparation, dans le cas où son jugement vous est défavorable, vous n'obtiendrez rien. Ce qui met la MINUSTAH dans une situation où elle est juge et partie à la fois.

Selon les normes en vigueur en Haïti, c'est un agent de la police routière, maîtrisant le code de la route haïtien, qui fait le jugement avec les deux parties en présence et détermine qui a tort et qui a raison. Le conducteur fautif sort avec une contravention et paie une indemnité (en fonction du type d'accident - minimum 1000 gourdes). Celui qui a raison obtient réparation de l'OAVCT en fonction de la gravité des dommages et du plafond fixé par la loi. Si la MINUSTAH est venue pour aider à la stabilisation du pays, ceci implique aussi le respect des lois haïtiennes. Tous les véhicules de la MINUSTAH, exception faite pour les engins de guerre, doivent être couverts par un contrat d'assurance à responsabilité civile auprès de l'OAVCT. C'est une obligation légale.


Gaspard Dorélien
gasparddorelien@lenouvelliste.com

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