mars 30, 2007

LES DERIVES DOMINICAINES DENONCEES PAR AMNESTY INTERNATIONAL

Les dérives dominicaines dénoncées par Amnesty International


L'organisation internationale de défense des droits humains, Amnesty International, vient de dénoncer officiellement les agissements racistes et inhumains réservés aux compatriotes haïtiens vivant en République dominicaine. Dans un rapport rendu public cette semaine, l'organisation a dénoncé le fait que des migrants haïtiens soient privés des droits humains les plus élémentaires de l'autre côté de la frontière.

S'appuyant sur des exemples concrets, Amnesty International a mis l'accent sur le caractère raciste des décisions des autorités dominicaines relativement à sa politique de déportation des immigrants vivant sur le territoire dominicain.

En effet, le 4 janvier 2006, une fillette de huit ans prénommée Mathilde a été arrêtée dans une rue à Santo-Domingo par des agents dominicains qui l'ont giflée à deux reprises au point qu'elle avait la bouche qui saignait. « Mathilde a passé toute la nuit dans un centre de détention pour migrants en situation irrégulière, sans pouvoir prévenir ses parents. La fillette a échappé de justesse à une expulsion en Haïti grâce à l'intervention d'une organisation locale de défense des droits humains qui avait prouvé qu'elle était Dominicaine. La fillette étant noire, les agents avaient présumé qu'elle était haïtienne et qu'elle se trouvait illégalement dans le pays », lit-on dans ce communiqué publié par la version francophone de Amnesty International au Canada.

Le rapport d'Amnesty International montre également que la discrimination raciale empêche les Dominicains d'origine haïtienne d'obtenir un certificat de naissance. Sans acte de naissance, les Dominicains d'origine haïtienne n'ont pas accès à l'enseignement secondaire ; ils ne peuvent pas réclamer leur carte d'identité lorsqu'ils ont dix-huit ans. De ce fait, il sont privés de tout droit civil ou politique et n'ont pas accès au marché du travail.

La discrimination raciale fortement ancrée dont sont victimes les migrants haïtiens vivant en République dominicaine a conduit à des expulsions arbitraires massives et à la privation d'acte de naissance pour des milliers d'enfants, selon une nouvelle étude publiée par Amnesty International à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale. Continuer >




Au moins un demi-million d'Haïtiens vivent en République dominicaine où ils travaillent principalement dans l'agriculture et le bâtiment. Il faut noter aussi, ces cinq dernières années, une très forte tendance des jeunes bacheliers haïtiens à partir faire des études universitaires, para-universitaires et professionnelles en République dominicaine. L'offre en Haïti étant inférieure par rapport à la demande de plus en plus croissante.

Entre 20,000 et 30,000 personnes sont expulsées de République dominicaine chaque année, dans la plupart des cas en dehors de tout cadre juridique. Certains d'entre eux sont des sans-papiers alors que d'autres sont expulsés parce qu'ils sont noirs, la couleur de l'épiderme étant un des motifs d'expulsion.

Fuyant la pauvreté dans leur pays, la plupart des déportés retournent toujours en République dominicaine, acceptant des emplois mal rémunérés et pénibles.

S'appuyant sur des faits et des témoignages de plus en plus accablants, Amnesty International a demandé aux autorités dominicaines de mettre fin aux expulsions arbitraires de migrants haïtiens et aux politiques discriminatoires qui empêchent les Dominicains d'origine haïtienne d'obtenir la nationalité dominicaine.

Eduardo est né en République dominicaine. Il a quarante-deux ans mais n'a pas de certificat de naissance ni aucun papier d'identité parce que ses parents sont haïtiens. Ses quatre enfants n'ont pas non plus de papiers, bien qu'ils soient nés en République dominicaine. Pour demander un certificat de naissance, Eduardo devrait verser 147 dollars américains, soit plus du revenu mensuel de la famille, sachant que le gouvernement pourrait même alors ne pas lui accorder de papiers d'identité.

«Du lieu de travail jusque dans la rue, les migrants haïtiens qui vivent en République dominicaine sont confinés au bas de l'échelle sociale, a déclaré Gerardo Ducos, chargé des recherches sur les Caraïbes au sein d'Amnesty International. Eux et leurs enfants nés en République dominicaine sont privés des droits les plus élémentaires aux yeux de la société et de l'État dominicains.»

La République dominicaine pratique le Jus soli, le droit du sol. En vertu du droit du sol, tous les enfants nés sur le territoire dominicain devraient avoir automatiquement la nationalité dominicaine. Cependant, le pays voisin a toujours refusé ce droit aux descendants haïtiens. En 2005, le Sénat dominicain allait jusqu'à proposer une révision constitutionnelle qui aurait pour objet l'adoption du Jus sanguinis (droit du sang) en lieu et place du droit du sol. Ce projet appuyé par les secteurs conservateurs et anti-haïtiens a été dénoncé par une bonne partie de la société civile de la République voisine.


S.B.

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