janvier 27, 2022

LE RÉFÉRENDUM CONSTITUTIONNEL HAÏTIEN SERAIT-IL MORT-NÉ ?

Jean-Marie Mondésir
Le président de la République a mis en place un comité consultatif indépendant (CCI) avec des personnalités importantes dans le but de travailler sur un nouveau projet de société. Ce nouveau projet cherche à mettre l’accent sur une nouvelle constitution qui inclut la diaspora, les femmes et les jeunes. Il vise aussi à redéfinir les rôles de nos institutions de manière à créer la stabilité politique, à encourager la croissance et à favoriser la création de la richesse dans l’intérêt de la population défavorisée. Pour le président Jovenel Moïse, il s’agit bien de réaliser son engagement électoral avant de terminer son mandat le 7 février 2022. À la vérité, le contexte de crise institutionnelle et politique représente un moment idéal par la présidence d’initier cette démarche avant d’enclencher le processus électoral visant à renouveler le personnel des postes électifs. Il est important de noter depuis le 13 janvier 2020 marquant la fin de la 50e legislature, le Parlement est quasi inexistant avec seulement 10 sénateurs. Les élections pour remplacer les 119 députés, les 2/3 du sénat, les membres du conseil communal, du conseil de la section communale, des délégués et de vice- délégués n’ont pas pu se tenir dans le temps réglementaire. La raison est simple, les parlementaires n’ont pas voulu voter la loi électorale et le budget national pour permettre d’organiser le processus électoral afin de respecter les dispositions constitutionnelles. De plus, les parlementaires n’ont pas soumis le choix de leurs représentants à l’exécutif pour pouvoir constituer le Conseil électoral permanent. Le président qui est garant de la bonne marche des institutions se voit dans l’obligation de mettre en place un Comité consultatif indépendant (CCI) chargé de présenter un nouveau projet de constitution à la population. Étant donné que le chef d’Etat fait face à une résistance de ses opposants politiques depuis plus de 4 ans de son mandat, ces opposants ont mis tout en œuvre pour lui faire échouer dans sa démarche de doter le pays d’une nouvelle charte fondamentale inclusive, complète et compréhensible. Ils ont choisi de contester l’initiative présidentielle en invoquant l’article 284.3 de la constitution de 1987 amendée sur fonds de controverse en 2011 stipulant: Toute consultation populaire tendant à modifier la constitution par voie référendaire est formellement interdite. Ce qui est incompréhensible, le Comité consultatif indépendant (CCI) ne vise pas à modifier la constitution de 1987 parce que cette loi-mère a déjà prescrit la procédure de son amendement à l’article 282 et suivants. Ils ont essayé de détourner l’attention sur un faux débat alors qu’il s’agit d’un nouveau projet de société qui est supra constitutionnel. À notre connaissance, il n’est prévu nulle part que le peuple souverain ne peut pas être consulté sur le changement de modèle de société. Il est important de savoir qu’en droit, le verbe modifier diffère de changer pour proposer une chose nouvelle. De plus, au moment de l’adoption de la constitution de 1987 il y avait la constitution de 1983 qui était en vigueur. Où est le problème de consulter le peuple souverain au cours d’un processus référendaire? Ce qui paraît drôle, la chambre des députés a donné mandat à une commission parlementaire de travailler sur les amendements constitutionnels dirigée par Jerry Tardieu. Cette commission a remis son rapport au bureau de la chambre, mais le président du bureau n’a pas daigné mettre à l’ordre du jour le rapport de cette commission afin de l’adopter au cours d’une assemblée parlementaire. Ce qu’il faut savoir que le Comité consultatif indépendant (CCI) a dressé l’inventaire de toutes les propositions soumises à l’exécutif. Les membres de ce comité ont consulté des experts et des constitutionnalistes avant de proposer un nouveau projet à la critique et aux observations des gens intéressés. Au lieu d’analyser le contenu de ce nouveau projet de société qui tient compte de plusieurs recommandations, les opposants au régime montrent au créneau pour le dénoncer et critiquer la procédure établie, les membres du comité , l’inconstitutionnalité de ce projet, le référendum constitutionnel, etc. Par pure égoïste et de mauvaise foi des acteurs politiques et ceux qui avaient la mission d’amender la constitution interprètent de manière erronée l’article 284.3 de la constitution afin de ne pas reconnaître le bien-fondé de l’initiative présidentielle de former un Comité consultatif indépendant pour s’occuper de ce dossier. Les opposants au régime PHTK qui nourrissent une haine viscérale contre le président Jovenel Moïse menacent de bloquer le processus référendaire visant à inviter le peuple souverain à se prononcer sur ce nouveau projet de société en choisissant OUI je l’approuve ou NON je rejette la nouvelle constitution. Au lieu de profiter du contexte politique où le Parlement est dysfonctionnel pour identifier les obstacles majeurs au sous-développement de la nation, les acteurs de l’opposition qui reconnaissent la nécessité de remanier la loi fondamentale pour mieux s’adapter à la réalité ne veulent pas que le régime en place dote le pays d’une nouvelle constitution. Tout le monde reconnaît la nécessité d’agir pour identifier la source des crises incessantes après chaque quinquennat afin de chercher à créer la stabilité politique et à redéfinir les rôles des institutions républicaines dans les meilleurs intérêts du pays. Toutefois, cela n’empêche pas à certains acteurs bénéficiaires du système d’utiliser la violence pour intimider ceux et celles qui veulent s’exprimer librement sur la nouvelle constitution diffusée au grand public à des fins critiques, discussions et commentaires. Il est vraiment triste de constater que les acteurs politiques haïtiens ne se soucient pas des conditions socio-économiques, politiques, sécuritaires et alimentaires de la population pour dialoguer dans un esprit fraternel de manière à trouver des solutions durables à la crise multiforme de notre pays. Ils ne prennent pas conscience que leur refus de dialoguer pour faire des compromis crée un obstacle majeur au bien-être de la population qui crève de faim au quotidien. On doit être conscient que les gens éprouvent beaucoup de difficultés à nourrir les membres de leur famille, à trouver du travail, à obtenir des soins de santé et d’éducation de qualité. De plus, ils font face à un climat d’insécurité grandissant des gangs armés qui investissent les bidonvilles de la capitale. Avec le phénomène grandissant de kidnapping qui decapitalise les familles de la classe moyenne, les citoyens sont terrorisés par la violence et l’insécurité de ces bandits principales victimes des politiciens insouciants. Cependant, on constate que les acteurs politiques ne se préoccupent pas des difficultés rencontrées par les plus démunis lorsqu’ils décident de durcir leur position pour ne pas faire de compromis avec le chef d’Etat afin de réaliser des projets utiles susceptibles d’améliorer les conditions socio-économiques difficiles des gens résidant dans les bidonvilles et du milieu paysan. Ils préfèrent donner le dégoût aux jeunes universitaires diplômés qui sont au chômage de fuir leur pays d’origine pour se réfugier ailleurs dans des conditions exécrables dans les Antilles ou en République Dominicaine, au Brésil, au Chili, aux États-Unis, etc à la recherche d’une vie meilleure afin d’assurer la sécurité et le bien-être de leur famille. Il est vrai que la communauté internationale ne soutient pas la démarche présidentielle visant à résoudre les problèmes récurrents confrontés par notre société. Les interventions publiques des ambassades étrangères des pays occidentaux qui veulent dicter la conduite à suivre au chef de l’État sont inacceptables et révoltantes. À notre connaissance, Haïti est un pays souverain et nos dirigeants ne doivent pas accepter de recevoir d’ordre des pays soi-disant amis. L’ingérence des acteurs étrangers dans les affaires politiques haïtiennes doit interpeller les patriotes nationalistes au-delà d’un esprit partisan. Quelles que soient nos divergences idéologiques, les citoyens patriotes concernés doivent soutenir la démarche présidentielle afin de doter notre pays une nouvelle constitution inclusive, complète et compréhensible. Le chef d’Etat haïtien n’est obligé de suivre les dictats des pays occidentaux qui cherchent à imposer un modèle de démocratie ne correspondant pas à nos valeurs et à nos capacités financières. L’adoption du nouveau projet de société par le peuple souverain permettra à la société de faire une économie substantielle sur l’organisation des élections générales. Si le peuple se prononçait massivement en faveur de la nouvelle constitution, tous les postes électifs auraient un mandat de 5 ans. Les candidats au poste de président auront un vice-président à ses côtés et le sénat de la République serait aboli. La nouvelle constitution entraînera la réorganisation et le découpage des circonscriptions électorales Il y aurait une personne agissant comme maire à la commune et un coordonnateur de la section communale. Il en est de même pour la réorganisation de l’assemblée de la section communale, communale et départementale qui sont des éléments très utiles à prendre en considérations. L’économie dégagée de cette réforme électorale permettra au trésor public de trouver des fonds nécessaires pour investir dans la production agricole, l’éducation, les soins de santé, la justice et la sécurité. Les autorités publiques auront les moyens financiers de dynamiser les magasins d’Etat pour mieux contrôler le prix des produits de première nécessité sur l’ensemble du territoire. On encourage le président de la République à respecter ses engagements envers la nation afin de doter le pays d’une nouvelle constitution qui serait profitable aux plus démunis du pays. On invite les organisations politiques à analyser le bien-fondé de ce nouveau projet société, à le critiquer et à faire valoir leurs opinions afin de construire ensemble une société démocratique solidaire, juste et sécuritaire pour tous. Mettons de côté nos différences idéologiques pour réfléchir sans manipulation ni tractations politiques afin de résoudre les conflits récurrents qui divisent les acteurs après chaque quinquennat. Démontrons à la communauté internationale que le peuple haïtien a la capacité nécessaire de choisir ce qui lui est important pour son développement socio-économique et institutionnel. Jean-Marie Mondésir Juriste haïtien | Spécialiste en droit civil Maître en sciences de Développement Éditeur de Port-Salut Magazine | La voix de Dumont | radio-Dumont.com | radiodumontinter.com

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